"L'orphelinat"

Un film fantastique espagnol : « L’orphelinat » de Juan Antonio Bayona.
C’est le premier film de ce jeune réalisateur donc on connaît pas grand-chose de lui, il a fait des courts métrages qu’on n’a pas vus ; bref, on va le juger sur celui-ci.
C’est le producteur du film que l’on connaît puisque c’est monsieur Guillermo del Toro (« Blade 2 » ; « l’échine du diable » ; « Hellboy » ; « Le Labyrinthe de Pan ») et le film a des apparentés avec son œuvre mais s’en écarte aussi.
Le scénariste Sergio G. Sanchez est aussi un des personnages clés de ce film ; tout aussi inconnu pour moi mais il est à la base de cette histoire bien écrite.
Le film est à ce jour le plus grand succès au box-office en Espagne : ça fait rêver alors que chez nous c’est une merde de comédie qui fait jaser. Les espagnols préfèrent-ils des histoires mortifères ou des films de qualités, voire les deux ??
De plus, ce film a reçu le Grand Prix et le Prix du Jury Sci-Fi au Festival de Gérardmer, il a été distingué lors de la cérémonie de remise des Goyas (les Césars espagnols) : nommé 14 fois (un record !), le film est reparti avec 7 trophées, dont celui du Meilleur scénario.
Bref, beaucoup d’enjeux ; voyons donc ce que j’en pense.

Laura et Carlos emménagent dans un ancien orphelinat où Laura a vécu dans son enfance pour en faire un centre pour handicapés. Ils ont un fils de 7 ans, Simon.
Un jour, il disparaît. Laura va devoir aller au-delà de la raison et de la réalité pour le rechercher.


Un film fantastique avec en piste claire la thématique de la maison hantée mais pas uniquement mais elle est présente néanmoins : une maison réunissant des enfants, ça peut rappeler « L’échine du diable », « Saint Ange » donc, c’est un peu balisé mais qu’importe l’originalité, l’important c’est d’être touché. Et c’est le cas.
Le truc intéressant du film est l’harmonie entre le côté réaliste et les manifestations du fantastique : tout peut s’expliquer dans chacun des 2 registres ; en particulier la résolution du mystère.

Visuellement, c’est bien éclairé, belle atmosphère, du rythme quand il faut et un superbe générique de début. Du bon travail pour un débutant ; on n’est pas en présence d’un génie mais d’un bon narrateur (c’est même Guillermo qui le dit ; lui-même ne l’étant pas mais il a d’autres qualités surtout cinégéniques, très supérieures à son poulain).
Quelques bonnes séquences de trouilles ; la voisine de derrière a crié plusieurs fois et les cardiaques devraient éviter le film.
Et là aussi, le réalisateur mélange parfaitement réel et fantastique rendant tout cela crédible au contraire de Guillermo qui les scinde généralement (voir à ce titre « Le Labyrinthe de Pan », très bon pour chaque partie mais les liens entre sont trop voyants).
Le fantastique ne peut qu’exister que dans la réalité, c’est un glissement : définition de Stephen King. Guillermo aime le merveilleux mais ça n’existe pas.
Le film est donc efficace et c’est ce qu’on lui demande.

Et pour y croire au fantastique, faut des acteurs qui nous guident, qui dérapent, qui chutent. Et la révélation ici est donc Laura jouée par Belen Rueda, actrice d’une série familiale espagnole, « La famille Serrano » diffusée récemment sur France 3 (je ne sais pas quelle saison, y’en a 5) et dans le dernier Alejandro Amenabar « Mar Adentro » : elle est très crédible dans son rôle vacillant (au contraire d’un Jack Nicholson (exceptionnel) dans « Shining », film qui a aussi des apparentés avec notre film, où il marque très certainement sa folie) ; elle porte d’ailleurs le film sur ses épaules et plutôt bien. Le petit Simon (Roger Princep) a une bouille adorable et on peut noter la présence de Geraldine Chaplin pour un rôle de médium dans une séquence d’anthologie et flippante avec ça.


Un premier film très correct, intéressant, flippant, émouvant (la fin !) : que du bon tout ça ; avec un réalisateur à suivre (j’ai mis mes détectives sur l’affaire).
Bref, des récompenses très justes.

Bon film !!